France-Inter 28 mai 2001. Extrait.

José Artur Vous avez un style assez extraordinaire, moi, j'appelle ça "en billes de flipper"…

Michèle Franceschi On ne m'a encore jamais dit ça!

JA C'est-à-dire que ce sont des brèves plus ou moins longues… On est sur le lac de Tibériade, sur la terrasse d'une villa à Thèbes, et puis brusquement on est dans un resto du 15ème, sans quasiment de transition… Il y a des amants qui sont mariés, une copine qui tient une boutique, un môme qui part à La Rochelle pour sa première escapade amoureuse, puis à la fin on s'aperçoit que c'est pas avec une fille, mais avec un mec… Il y a tout un mélange, comme ça, avec énormément de culture, de notes réelles sur l'Egypte, l'Inde… Et puis du prosaïque immédiatement… Vous parlez de bouffe toutes les trois pages, on boit de la vodka, de la verveine, on bouffe des endives trop cuites… Bing, bing, bing, et ça arrive au but. Vous l'avez voulu, ou bien dans la vie vous êtes une femme décousue?

MF Si vous voulez, c'est (la réintégration des vies passées) plus une recherche personnelle qui aboutit finalement à une recherche spirituelle, mais la vie continue… Ce n'est pas parce que vous faites des recherches en ce sens que vous vous arrêtez de manger ou d'aller au cinéma… J'ai voulu écrire le roman de la façon la plus réaliste possible pour faire contre-poids à toutes ces élucubrations issues de l'inconscient…

JA L'après-mort, est-ce que ça vous inquiète?

MF La première chose qui se passe, quand vous vous lancez dans la réintégration des vies passées, c'est que vous n'avez plus peur de la mort…

JA Vous rappelez que Mozart disait que la mort était la meilleure amie de l'homme…

MF Bien sûr… Vous vous dites, bon, je suis déjà mort 50 fois, une de plus, une de moins… Et puis vous savez que tout est provisoire.

JA On pense au mot de Montaigne: "Ce n'est pas la mort, mais le mourir qui m'inquiète."

MF Attention, là je parle de l'après-mort, et pas d'une mort douloureuse, dramatique… Evidemment, la mort elle-même peut être épouvantable, mais on peut aussi avoir une maladie épouvantable sans mourir… La souffrance est inhérente à la vie humaine.

JA La pire maladie, c'est la vie, quand même! Elle est… transmissible… et incurable…

MF Oui, c'est drôle, les gens ont peur de la mort, alors qu'ils n'en savent strictement rien, et pas de la vie, qui est atrocement dangereuse…

JA Alors, l'Animal-Soleil, c'est un roman, il y a un deuxième livre qui est tout prêt, un troisième qui est dans la tête, hier vous avez écrit pour le théâtre, et maintenant je peux tout de même dire que vous avez chanté Carmen… Ne pas le dire du tout, c'était bête… Vous avez plein de "distractions" intéressantes dans la vie… Moi, j'ai un souvenir des pyramides, c'est que je me suis cogné la tête!...

MF Oui, c'est très difficile de monter dans Chéops…

JA Les catacombes de Paris et ça… Mais pour d'autres, c'est quand même plus qu'une tombe…

MF Bien sûr.

JA Et on en parle beaucoup dans le livre